Ces notes concernent un enseignement suivi en NPCA durant l’année universitaire 2023-2024. Elles peuvent contenir des coquilles/fautes d’orthographe et des erreurs. Dans une démarche éthique et responsable, également dans une dynamique de protection de la spécialité et de la profession, je souhaite qu’elles ne soient pas transmises en dehors des promotions NPCA sans me le demander. Yoan Segura – Étudiant NPCA 2022-2024 (N’hésitez pas à me contacter si nécessaire :
[email protected]) NPCA : Neuropsychologique clinique de l’adulte ; parcours de master proposé à l’université de Toulouse.
PY902 COURS 5 INTERVENTION AUPRÈS D’UNE PERSONNE EN CRISE SUICIDAIRE 1. Sur le thème du suicide – Ignorer le risque suicidaire est-il une faute professionnelle ? Oui, ignorer le risque suicidaire est une faute professionnelle : un psychologue qui a été informé du risque peut se voir convoqué par la justice. Très alarmant quand la personne va soudainement mieux après avoir mentionné des idées suicidaires. – Parler des idées suicidaires augmente le risque de passage à l’acte ? Non, parler des idées suicidaires n’augmente pas forcément le risque de passer à l’acte. Parfois mieux que la personne en parle. – Le suicide, 13ème cause de décès à l’échelle de la planète ? Chiffres erronés car très vieux + sujet tabou et non masqué dans certains pays. – Il existe toujours une ambivalence jusqu’au passage à l’acte dans le processus suicidaire ? Oui, on peut essayer de retenir la personne à tout moment. – Existe-t-il un numéro d’urgence pour les personnes qui veulent se suicider ? Oui, le 3114. Appeler le 15 si un patient nous paraît être sur le point de le faire de façon imminente. 2. Quelques chiffres En France, environ 200 000 TS/an (90% par médicament). La France est un des pays les plus touchés par les TS. 50-80% correspondent à un trouble de l’humeur. Dans les questions à poser en psychiatrie, il faut prendre en compte les critères diagnostiques de la dépression (sommeil, appétit, tristesse, ruminations, perte d’intérêt... depuis 2 semaines, presque toute la journée, presque tous les jours). Pour les troubles borderline, on peut ajouter des questions sur la mise en danger, un sentiment de vide intérieur, colères intenses, recherche sociale par peur de l’abandon, comportements toxiques (toxicomanie, sexualité), impulsivité, ambivalences (patients qui viennent puis du jour au lendemain ne viennent plus), passer de « je déteste » à « j’adore »... La schizophrénie, la bipolarité peuvent aussi augmenter le risque de TS : il est important de demander au patient s’il se sent parfois euphorique, parfois très déprimé, sentiments de toute- puissance, dépenses démesurées, multiplication des partenaires... Dans la bipolarité, il y a souvent des antécédents psycho-traumatiques ou relations instables avec les parents. Il faut également prendre en compte les aspects biologiques, par exemple voir s’il y a eu un changement radical au niveau de la thyroïde. – Fréquence plus élevée de suicide chez les garçons – Fréquence plus élevée de TS chez les filles – Fréquence des récidives importante : 30 à 50% la 1ère année – La gravité augmente au fur et à mesure des récidives – TS et suicide : facteur de risque principal de suicide 1% des suicidants (TS) se suicident dans l’année (10-14% vie entière) 3. Définitions – Suicidaire : qualifie une pensée, un individu, un processus, un risque, un acte, lorsque la mort est appréhendée par un individu comme seule solution à une situation. – Suicidant : celui qui fait une tentative de suicide. 1
PY902 COURS 5 – Suicidé : individu mort par suicide. L’Anaes (2001) propose la définition suivante : « Il s’agit d’une crise psychique dont le risque majeur est le suicide. Elle peut être représentée comme la trajectoire qui va du sentiment péjoratif d’être en situation d’échec à l’impossibilité d’échapper à cette impasse, avec l’élaboration d’idées suicidaires de plus en plus prégnantes et envahissantes jusqu’à l’éventuel passage à l’acte, qui ne représente qu’une sortie de la crise mais lui confère sa gravité. Elle est un état réversible temporaire, non classé nosographiquement, correspondant à une rupture de l’équilibre relationnel du sujet avec lui-même et son environnement. » De nombreuses variables entrent en jeu avant le passage à l’acte : trouble psychiatrique, facteurs biologiques, génétique et histoire familiale (il y a très souvent des éléments avec lesquels on peut faire du lien dans la famille), traits de personnalité, environnement psychosocial, évènements de vie... C’est une période où, pour un sujet donné, le suicide devient une solution pour mettre fin à sa souffrance actuelle. La personne ne veut pas mourir, mais arrêter de souffrir. Cette période marquée par la souffrance et la tension dure souvent de 6 à 8 semaines. 4. Reconnaître l’état de crise 1. La personne est submergée par les émotions. 2. La tension émotive provoque un épuisement des ressources cognitives. 3. La perception de la réalité est embrouillée. 4. Elle n’arrive plus à trouver des solutions à ses difficultés. 5. Elle peut se tourner vers des solutions inadaptées, tant elle est démunie ou empressée à trouver un apaisement. 5. Modèle de la crise suicidaire Solutions inefficaces ou inadéquates ... Recherche active de solutions 2
PY902 COURS 5 ... Le champ des possibles se rétrécit ... Flash, messages indirects ... Idées fréquentes, baisse d’estime de soi ... Ruminations, messages verbaux ... Cristallisation, plan suicidaire, recherche de moyens Dans l’ordre de fréquence : médicament > défenestration > pendaison 6. Résolution possible de la crise Résolution adéquate : – Recadrage du problème de départ, crise se résorbe avec apprentissage de nouvelles stratégies d’adaptation – Augmente l’éventail de réponse face à un évènement Retour à l’équilibre antérieur : – Même niveau de fonctionnement que par le passé, diminution de la souffrance sans être une occasion d’apprentissage et d’introspection personnelle Résolution inadéquate : – Stratégies qui diminue le niveau de stress, d’anxiété, de souffrance mais qui à long terme peuvent avoir des conséquences néfastes (alcoolisme, toxicomanie...) – Pas de retour à l’équilibre 7. Étapes-clé de l’intervention 7.1 Établissement d’un lien de confiance entre l’intervenant et la personne suicidaire – Une question d’attitude (accepter d’être un support et le relais vital pour la personne) : si la personne arrive en disant qu’elle a fait une TS, poser les questions en lien avec troubles de l’humeur (cf. au-dessus) + demander si c’est déjà arrivé, ce qui a motivé l’action, si la personne a envie de mourir... – Empathie : montrer que l’on est capable d’entendre et de mettre des mots sur ce qu’elle vit et exprime. – Ne pas minimiser ni dramatiser, suivre le rythme de la personne sans mettre en doute la souffrance – Ne pas penser aux solutions trop tôt pour être réellement à l’écoute – Aucune attitude moralisatrice ou de jugement de valeur Peurs et craintes les plus fréquentes : Suis-je en sécurité ici ? Est-ce que j’accepte de le faire « entrer dans ma vie intérieur » ? L’intervention va-t-il m’irriter, m’énerver ? 3