Petit dictionnaire des mots rares et anciens de la Langue Française à Charles Sabatier Téléchargement et usage libres – Toute utilisation, même partielle, à des fins commerciales ou assimilées interdite.
La rencontre avec un mot nouveau ou oublié est comme la découverte d’un paysage inconnu, chargé de parfums, de senteurs, de couleurs, de mystère et parfois de frisson ...le sens qu’on lui prête alors, souvent fort éloigné de son sens véritable, est la marque du lien que l’on essaie de tisser avec lui : ne pouvant « forcer » sa signification, on le drape, le vêt d’un voile de sens imaginaire, première approche de ce syntagme qui a tant à nous dire ! Dans Milly ou la terre natale, Lamartine pose superbement la question de l’attachement sentimental à l’objet : Objets inanimés, avez-vous donc une âme Qui s'attache à notre âme et la force d'aimer ?... Qu’est un mot sinon un objet du langage, matière vivante de la pensée, sujet de transformation, de déformation, reflet des changements amenés par les nouvelles générations ? Chaque mot de notre langue est chargé d’histoire, et l’étude de son étymologie, de ses origines nous plonge dans les méandres et enchevêtrements des racines de notre patrimoine culturel. Délaissés, méprisés, oubliés, raillés parfois, des mots rares ou anciens sommeillent dans des replis de vieux dictionnaires...pourtant, le manque d’usage nous a souvent privés de la possibilité d’exprimer avec un seul terme ce qui demande parfois l’emploi de plusieurs substantifs, adjectifs ou épithètes, ce qui est bien dommage... Qui sait encore ce qu’est un escobar ? un individu matois ou chafouin ? Ce jeune siècle, tout encore imprégné du précédent laisse une large place aux médias et à la communication, et force est de constater que la rhétorique, autrefois simplement l’art de parler de manière à persuader, est devenue une arme redoutable dont usent et abusent maints personnages publics afin d’emporter l’adhésion du plus grand nombre à des idées en un minimum de mots ; aussi ai-je délibérément accordé une place de choix aux figures de style comme les métaplasmes et autre synecdoque, afin de donner sans prétention d’exhaustivité au lecteur quelques clefs, pour qu’il puisse mieux comprendre comment les publicitaires –pour ne citer qu’eux !- l’influencent à son insu. Si les termes grammaticaux sont nombreux dans ce petit dictionnaire des mots rares ou anciens de la langue française, il n’empêche qu’ils ne constituent pas l’essentiel de cette compilation qui a surtout pour ambition de donner le goût au lecteur de redécouvrir les trésors que notre belle langue recèle. Il y trouvera des termes grecs, romains, médiévaux, pour ne citer que ceux-là, ainsi que de nombreux bijoux de l’édition originale du Littré. Didier Méral - 2006 Vers. 14 Décembre 2008
[email protected] Abadir : (a-ba-dir), n. f. Terme de Mythologie. C'est le nom d'une pierre que Saturne devora au lieu de Jupiter. (Furetière 1690). Abalourdir : (a-ba-lour-dir), v. t. Rendre balourd, hébété. Populaire. Abaque : (a-ba-k'), n. m. 1° Terme d'architecture. Tailloir, partie supérieure du chapiteau des colonnes, sur laquelle porte l'architrave 2° Terme d'antiquité. Tableau couvert de poussière, sur lequel on traçait des nombres et on enseignait le calcul. Abat-faim : (a-ba-fin), n. m. Terme de cuisine. Pièce de résistance qu'on sert la première sur table. Au plur. des abat-faim. Abator : (a-ba-tor), n. m. Qui est entré en possession. Ce mot, dans les Tenures de Littleton, désigne celui qui s'est mis en possession, qui s'est saisi d'un héritage. (La Curne) Abat-sons : (a-ba-son), n. m. Se dit des lames de bois recouvertes de plomb ou d'ardoises qui garantissent les beffrois de la pluie et renvoient le son vers le sol. Au plur. des abat-sons. Abattis : (a-ba-tî), n. m. Terme de fortification. Défense accessoire consistant en un amas d'arbres entrelacés, liés ensemble et arrêtés sur le sol. Abattures : (a - ba - tur'), n. f. plur. Terme de chasse. Trace qu'un cerf laisse dans les broussailles où il a passé. Le cerf se reconnaît à ses abattures. Abave : n. m. Bisaïeul. Du latin abavus, de même qu'on a dit ave ou ayeul du latin avus, grand- père. " Abave, grand ave " (Bouteill. Som. Rur. p. 464.), (La Curne) Abeausir : (S') (a-bô-sir), v. pr. Marine. Se mettre au beau. Le temps s'abeausit. Abée : (a-bée), n. f. Ouverture par laquelle coule l'eau qui fait aller un moulin. On l'a aussi définie ouverture par où l'eau a son cours quand les moulins ne tournent pas. Abeillage : n. m. Droit Seigneurial. Laurière le définit " un droit en vertu duquel les abeilles épaves et non poursuivies, appartiennent aux Seigneurs Justiciers. " (La Curne) Aber : (a-bèr), n. m. Profond estuaire de rivière en Bretagne. Abergeage : (a-bèr-ja-j'), n. m. Ancien terme de jurisprudence. Contrat primitif et première concession, que le seigneur faisait de son fonds à son premier emphytéote. Aberhavre : (a-bèr-ha-vr'), n. m. Embouchure de fleuve qui forme un port. (LA CURNE) Ab hoc et ab hâc : (a-bo-ké-ta-bak), loc. adv. et famil. Confusément, sans raison. Il parle ab hoc et ab hâc. Abienneurs : n. m. plur. Séquestres. (La Curne) Abigéat : (a-bi-jé-a), n. m. Terme d'ancien droit criminel. Délit de celui qui détourne les troupeaux d'autrui pour se les approprier. Abîme : (a-bî-m'), n. m. Terme de blason. Centre de l'écu lorsqu'il porte une ou plusieurs pièces qui ne chargent aucune des autres. Il porte trois besans d'or, avec une fleur de lis en abîme. Ab intestat : (a-bin-tes-ta), loc. adv. Terme de jurisprudence. A la suite d'une mort sans testament. Héritier ab intestat, succession ab intestat. Dix têtes viennent ab intestat partager sa succession, LA BRUYÈRE. Abiotique : (a-bi-o-ti-k'), adj. Terme didactique. Où l'on ne peut vivre. Abir : n. m. Jugement, sens, esprit. .... Vous avar tant d'abir, Bien saurés lors miaus coisir. Albir a eu la même signification dans le patois Provençal. (La Curne) Ab irato : (a-bi-ra-to), loc. adv. Sous l'influence de la colère. Lettre écrite ab irato. Testament fait ab irato.
Ablais : (a-blê), n. m. plur. Blés coupés qui sont encore dans le champ. Abluer : (a-blu-é), v. t. Laver, passer légèrement une liqueur préparée avec de la noix de galle sur du parchemin ou du papier, pour faire revivre l'écriture. Aboillage : n. f. Certain droit que des Seigneurs Chastelains avaient de prendre les abeilles dans les forests dependantes de leurs Chastelenies. Ce mot vient de ce qu'on disoit autrefois aboille, pour abeille. (Furetière 1690). Aborner : (a-bor-né), v. t. Mettre des bornes à un terrain. Faire aborner son champ. Abot : (a-bo), n. m. Espèce d'entrave que l'on met au paturon pour retenir les chevaux. Aboucher : (a-bou-ché), v. t. Mettre face à face, en conférence. Je voulais en secret vous aboucher tous deux, MOLIÈRE. S'ABOUCHER, v. pr. Conférer avec quelqu'un. Ils se sont abouchés, et sont convenus de la marche à suivre. Abradant : adj. Qui racle, ratisse ou gratte. On a dit au figuré : " les Méridionaux sont paillards à cause de la mélancholie spumeuse, abradante, et salace. " Charron. (La Curne) Abraxas : (a-bra-ksas'), n. m. Pierre précieuse sur laquelle étaient gravés des caractères et qu'on portait en amulette. Abrouti : IE (a-brou-ti, tie), adj. Terme d'eaux et forêts. Le bois est abrouti quand les premières pousses ont été mangées par le bétail et sont mal venues. Abscons : (ab-skon), adj. Difficile à comprendre. Absidiole : (ab-si-di-o-l'), n. f. Terme d'architecture. Petite abside. Abstème : (ab-stê-m'), n. m. et f. Qui ne boit pas de vin. Telle qu'est celle (l'exception) des abstèmes, qui ne peuvent boire de vin, BOSSUET. Nous serions tous abstèmes si l'on ne nous eût donné du vin dans nos jeunes ans, ROUSSEAU. Abstrus : USE (ab-stru, struz'), adj. Difficilement accessible à l'entendement. Une recherche si abstruse et si embarrassante, BOSSUET. Abuter : (a-bu-té), v. t. et v. int. 1° Terme de marine. Mettre bout à bout, ou toucher par un bout. Ces pièces de bois abutent 2° Au jeu de boule ou de palet, lancer la boule ou le palet vers un but pour savoir qui jouera le premier. Eh bien, abutons. Acade : n. m. Sillage. Oudin, dans son Dict. explique le mot acade, ou erre d'un vaisseau, par le sillage. (La Curne) Acagnarder : (a-ka-gnar-dé), v. t. 1° Rendre cagnard. La mauvaise compagnie l'a acagnardé, Acad. 2° S'acagnarder, v. pr. Devenir cagnard. S'acagnarder dans un fauteuil. Ces enfants se sont acagnardés au coin du feu. XVIe s. Je ne me peux contenter de moi mesme, me voyant ici oisif, acagnardé à un foyer, YVER. Acanthe : (a-kan-t'), n. f. 1° Plante dite vulgairement branche-ursine et remarquable par ses belles feuilles découpées et recourbées vers l'extrémité. On a dit que la feuille d'acanthe avait servi de modèle pour l'ornement du chapiteau corinthien. Voici la fête d'Olympie ! Tressez l'acanthe et le laurier, V. HUGO 2° Ornement d'architecture imité de la feuille d'acanthe. Acare : (a-ka-r'), n. m. Parasite de la classe des arachnides responsable de la gale humaine. Acatalectique : (a-ka-ta-lé-kti-k'), n. m. et adj. Terme de métrique ancienne. On appelait ainsi les vers auxquels il ne manquait aucune syllabe. Acaule : (a-kô-l'), adj. Terme de botanique. Qui n'a pas de tige apparente. Accointer : (S') (a-koin-té), v. pr. Faire accointance. Il s'est accointé d'un homme, avec un homme de fort mauvaise réputation.