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ENCYCLOPÉDIE DE LA FOI sous la direction de H. FRIES Tome II Espérance - Lumière LES ÉDITIONS DU CERF 29, boulevard Latour-Maubourg PARIS 1967
IMPRIMATUR : , Paris, le 3 février 1965 J. HOTTOT, Vic. gén. L'édition originale de cet ouvrage a paru en allemand au Kôsel Verlag, Münich, sous le titre Handbuch Theologischer Grundbegriffe L'édition italienne paraît aux Editions Queriniana (Brescia) L'édition espagnole parait aux Editions Guadarrama (Madrid) © Les Editions du Cerf, 1965 pour l'édition française ARTICLES DU TOME II ESPÉRANCE . . . . . . . . . 9 HOMME . . . . . . . . . . . . 233 18 ESPRIT-SAINT . . . . . . . HUMILITÉ . . . . . . . . . . 261 \ETAT . . . . . . . . . . . . . 30 IMAGE . . . . . . . . . . . . . 271 ETERNITÉ . . . . . . . . . . 46 IMITATION . . . . . . . . . . 280 ETRE . . . . . . . . . . . . . . 52 IMMORTALITÉ . . . . . . . 290 EUCHARISTIE . . . . . . . 66 INCARNATION . . . . . . . 311 EVANGILE . . . . . . . . . . 87 INSPIRATION . . . . . . . . 320 EVÊQUE . . . . . . . . . . . 95 INTELLIGENCE . . . . . . 331 EXCOMMUNICATION . . 112 ISRAËL . . . . . . . . . . . . 337 EXISTENCE . . . . . . . . . . 120 JÉSUS-CHRIST . . . . . . . 352 EXPIATION . . . . . . . . . 128 JOIE . . . . . . . . . . . . . . 386 FOI . . . . . . . . . . . . . . . 140 JUGEMENT . . . . . . . . . 391 FRANCISCAINS (THÉO- JUSTICE . . . . . . . . . . . 400 LOGIE DES) . . . . . . 162 JUSTIFICATION . . . . . . 416 GLOIRE . . . . . . . . . . . . 167 KÉRYGME . . . . . . . . . . 426 GNOSE . . . . . . . . . . . . 172 LAIC . . . . . . . . . . . . . . 436 GRACE . . . . . . . . . . . . 184 LIBERTÉ . . . . . . . . . . . 456 HÉRÉSIE . . . . . . . . . . . 199 LITURGIE . . . . . . . . 480 HISTOIRE DU SALUT . . 207 LOI . . . . . . ' . . . . . . . . . 506 HISTORICITÉ . . . . . . . . 226 LUMIÈRE . . . . . . . . . . . 520 La liste des abréviations se trouve d la fin du tome IV.
1. Ancien Testament. ESPÉRANCE I. ETUDE BIBLIQUE . II. ETUDE THÉOLOGIQUB I . ETUDE BIBLIQUE Pour dégager le caractère propre du concept biblique d'espérance, il faut le comparer à son homologue grec, dénué d'ailleurs de toute signification religieuse (cf. R. Bultmann). Dans l'Ancien Testament, il est caractéristique que l'espérance n'a pas du tout le sens neutre et imprécis d'une simple attente. En grec, cX7riç peut signifier toute attente, qui elle soit joyeuse ou angoissée, tandis que l'idée biblique d'espérance est toujours accompagnée d'un qualificatif précis ; elle est attente du bien, du salut*, et revêt une signification très proche de « confiance a. Plusieurs racines hébraïques expriment des conceptions analogues : gâwâh (être tendu vers, persévérer dans l'attente, espérer), yâhal (attendre, espérer), hakah (se tenir aux écoutes), sâbar (épier, espérer, attendre) . Parallèlement à ces expressions, nous avons encore deux autres mots . bâtah (avoir confiance) et hâsâh (chercher refuge, se mettre en sûreté), que les Septante traduisent aussi par ÉX7[i~sLv . La pensée grecque admet l'espérance (cf. Pindare, Fr. 214; Isthm. 8, 15) et cependant elle met en garde contre son incertitude même (Pindare, 01. 12, 5 s.) . Ce n'est pas par elle que l'homme a prise sur l'avenir, mais par la irpo~t~Ostoc, qui lui permet de juger le pré- sent et d'agir en conséquence (Pindare, Nem. 11, 46) . Dans l'Ancien Testament, par contre, la vie du juste est tout entière fondée sur l'es- pérance, non seulement dans l'épreuve (Ps. 13, 6; 33, 18 et 22; 119, 81 et 123, etc.), mais dans toutes les situations (Jr. 17, 7 ; Ps. 40, 5 ; 52, 9; 91, 2), et même dans la joie du salut (Is. 12, 2) . Cette espé- rance est toujours orientée vers Dieu et puise en lui son assurance. Dans les psaumes surtout, le juste reconnaît sa dépendance par rap- port à Dieu. Il dessaie pas d'imaginer un déroulement autonome de son avenir, au contraire il vit de son espérance en Dieu. Occasion- nellement, Dieu sera appelé lui-même Espérance et le Soutien sûr (Jr. 17, 7; Ps. 61, 4; 71, 5). Puisque, pour le juif, Dieu seul fonde
10 ESPÉRANCE à la fois le présent et l'avenir, tous deux deviennent incertains lorsque l'homme cherche à sen emparer par sa seule industrie. Il verse donc dans une fausse espérance, l'homme qui ne place pas sa confiance en Dieu mais dans les choses dont il dispose : les richesses (Ps. 52, 9; Job 31, 24), les autres hommes (Jr . 17, 5), la puissance politique (2 R. 18, 24; Is . 31, 1; 36, 6; Jr . 2, 37; Ez. 29, 16; Os. 10, 13), les privi- lèges religieux (Jr . 7, 4; 48, 13; Ha. 2, 18). L'espérance du juste, c'est la tranquille attente de Dieu (Is. 30, 15 ; Ps. 37, 5-7). L'attitude de Platon face à la mort est caractérisée par l'espérance (Apol. 41c, Phed. 64a, 67) . Les religions à mystères et le culte orphi- que aussi accordent aux initiés l'espérance en une survie bienheureuse après le trépas. Ainsi dans l'Antiquité - à côté de certains témoi- gnages foncièrement pessimistes sur l'au-delà - nous trouvons de nom- breuses preuves dans la littérature et l'épigraphie attestant que la mort ouvre sur l'espérance d'un monde meilleur. Nous saisissons là, entre la pensée grecque et la pensée juive, un décalage qui s'origine, en dernière analyse, dans une compréhension différente de l'existence (immortalité*) . Pour le juif, la mort* est une issue qui ne laisse aucune espérance (cf . Job 17, 15; Is. 38, 18; Ez. 37, 11) ; le seul motif de son espérance est l'action de Dieu *au bénéfice de son peuple sur cette terre (Royaume de Dieu*). Sur ce point, on assiste _dans l'histoire d'Israël à. une évolution : Israël compte de moins en moins sur un secours divin immédiat dans une situation donnée, mais il place tou- jours davantage son espérance en une intervention eschatologique de Dieu qui mettra ainsi fin à toute épreuve (pour les dimensions de l'espérance d'Israël, cf. : Gn. 9, 25-27; Is. 2, 2-4; 11, 6-9 ; 25, 9; 51, 5; Jr. 23, 5 et 6; 29, 11; 31, 16; Ez. 37; Za. 8, 4, etc.) . Dans la littérature rabbinique, la famille de mots que groupe la notion d'espérance disparaît presque complètement (cf. à ce sujet K H. Rengstorf). Par contre, on a trouvé récemment des témoignages en faveur de l'espérance dans les documents de la communauté de Qumrân (1 QH 3, 20. 27; 6, 6; 9, 10. 14; 10, 16 s. ; 11, 31 s . etc .) 2. Nouveau Testament. A pan quelques rares exceptions, les termes 6a7ttç, ÉATrt~stv, et leurs dérivés ne se rencontrent dans le Nouveau Testament que dans les écrits pauliniens et postpauliniens. Le P. de Guibert semble inter- préter correctement cet état de fait lorsqu'il le considère comme le résultat de l'éclatement conceptuel de l'unité primitive d'une notion complexe. Quant à sa réalité profonde, l'espérance se retrouve diver- sement accentuée et à des degrés d'intensité différente, dans tous les écrits du Nouveau Testament. La tradition synoptique manque d'un terme univoque pour la désigner, mais l'espérance est sous-entendue dans chaque réponse de l'homme aux exigences du moment. Les Synop- tiques offrent certains éléments du concept d'espérance dans le com- ESPÉRANCE mandement exprimé par les verbes yp-qyops~v ou S7to~&évety (Mc 13, 13). Chez jean, l'espérance est contenue dans la foi ; l'Apocalypse l'inclut dans l'ô7ro~tovA. Même les affirmations de Paul ne rendent que partiellement compte de la réalité profonde de l'espérance; celle-ci ne désigne guère encore une vertu* chrétienne autonome, mais montre simplement un aspect par- ticulier de l'expérience globale d'une vie de foi*, prise encore comme un unique tout. La Triade « foi, espérance et charité r (1 Co. 13, 13; 1 Th. 1, 3; 5, 8; Col. 1, 4 s.; Ep. 1, 15 s . etc.), qui justement à partir de Paul* revient si souvent dans la littérature chrétienne, sup- pose à la base cette unité profonde de la vie chrétienne dans sa diver- sité. Ainsi dans Ga. 5, 5 s ., nous voyons liées la foi qui = attend dans l'espérance a et celle qui « opère dans la charité ». Les deux termes 7rt7rtç et iXttlç étaient déjà rapprochés dans l'usage courant de la lan- gue, dans l'Ancien Testament. Ailleurs (1 Co. 13, 7), c'est la charité (amour*) qui croit tout, qui espère et supporte tout. D'après Rm. 5, 5, l'espérance est fondée sur la certitude de l'amour de Dieu. Comme dans l'Ancien Testament, l'espérance comporte, dans le Nou- veau, trois éléments : l'attente orientée vers l'événement futur, la con- fiance, la patience. La forme concrète en est cependant déterminée par le climat particulier de la communauté chrétienne primitive . Le groupe de mots désignant l'espérance décrit une situation de fait ou le salut est à la fois déjà présent et encore en attente. C'est le temps de l'entre-deux, qui est caractérisé par l'affliction, l'effort sans cesse exigé et la possibilité de l'échec . Même si l'ère nou- velle a commencé en Jésus-Christ*, le monde ancien continue à subsister . Même la vie du chrétien est une vie iv aapyi. Le salut n'est pas quelque chose que l'on puisse saisir facilement et dont on dispose à sa guise. Saint Paul Lprobablement essayé de réagir contre une exal- tation superficielle qui ferait fi de la dure réalité ; par l'espérance, il insiste sur le « pas encore A dans l'expérience religieuse du chrê- tien. Afin de bien exprimer la tension entre présent et futur qui éprouve même le croyant ayant reçu l'Esprit, saint Paul introduit (Rm. 8, 23 s .) l'espérance : votre salut n'est acquis qu'é7r' EapEBt . Cette notion est ainsi bien délimitée : une espérance qui voit ncst pas une espérance (Rm. 8, 24) . Saint Paul met ainsi l'accent sur une étape de l'accomplissement spirituel de la vie chrétienne, étape qui caracté- rise aussi la foi (2 Co. 5, 7) et qui apparaît en un clair relief dans l'espérance : le chrétien ne s'appuie pas sur des garanties intérieures au monde, mais attend 8e' ûnoptov~ç (Rm. 8, 25) ; il ne recherche pas les Pas7r6~tsva, qui sont npômcatpa et appartiennent à la sphère de la chair (axpe,), mais les E .t~ P),e7t6p,eva, qui sont aicwvtoc (2 Co. 4, 16-18) . Les mêmes concepts reviennent dans Hé. 11, 1 ; la 7t(a-rt qui est Dau~ogvcwv û7t6a-raatç, -est décrite comme l'gaeyxoç où paeTro- gvcùv (cf . aussi à ce sujet 11, 7. 8. 19. 27). Ainsi on exprime ici en termes de philosophie grecque le contraste chrétien entre Péon présent déjà voué au passé et l'ère future déjà mystérieusement présente. Il